| — | Par les
	putains de petits saints encombrant les Enfers de leur mesquineries
	présomptueuses ! Par les pourritures de vertueux proclamés,
	croupissant dans l'immondice de cloaques abyssaux... Par les
	maudites saloperies de gens biens comme il faut, dont
	on ne sait plus que foutre de leurs belles âmes, tout
	aussi répugnantes et poisseuses qu'une serpillière de bordel à
	soudards ! [moins emporté] Par
	tous les damnés de la Terre, couchés sans espoir de jamais pouvoir
	se relever, écrasés du lourd pesant de toutes leurs infectes
	dégueulasseries... Par
	tous les favorisés, que ce soit : en biens matériels, en
	capacités intellectuelles, en santé ou encore en beauté !
	(tu parles que ça compte...) lesquels n'en ont tiré qu'un parti
	essentiellement tourné vers eux-mêmes, pour jouir un peu plus –
	toujours plus ! – de trésors qu'ils croyaient acquis... En
	vérité, je vous le dis : vous perdrez tout !
	/ sauf la conscience aiguë de
	votre déchéance... /
 [geste
	significatif, comme s'il se souvenait subitement] Oh,
	j'aurais garde de ne pas oublier les défavorisés, dans tous
	les domaines cités, et toutes sortes d'autres, car eux me font
	peut-être plus encore horreur que les nantis. Car enfin, ils
	savaient de quoi il en retourne, de la misère, des épreuves, du
	désespoir, et de tout ce qui abaisse, humilie, meurtri, fait
	souffrir, souvent, longtemps. Et cela a changé quoi ? Pas
	grand chose, si ce n'est : rien. Si ce n'est pire !
	car leurs peines leur servent d'alibi : [grotesque]
	« Je ne peux pas avoir
	fait beaucoup de mal, vu que j'en ai tant subi ! »
	Or l'on voit toujours les discriminés s'en prendre à d'autres...
	des pires qu'eux ! Tandis que les rares qui s'en
	sont sorti trouvent cet état des choses somme toute
	assez normal. Rien ne l'est ! Pas plus les faveurs que
	les malheurs. La seule chose qui serait normale, c'est que vous
	soyez effacés à tout jamais de la Création ! dont vous êtes
	tous indignes. Je
	vous dégueule, tous et toutes autant que vous êtes, ici ramassés,
	dans un confort de pensée inerte, amusés de mes pitreries que vous
	prenez pour une farce. / Bah !
	Vous verrez bien... et rira bien qui vous verra derniers ! Et
	derniers d'entre les derniers, parce que vous, au moins : vous
	aurez su ! puisque je vous l'aurai dit. Et quoi : vous
	n'aviez qu'à pas venir... Maintenant : c'est trop tard !
	Trop tard, comme quand on se retrouvera, bientôt ! et
	qu'il ne sera plus temps de vous chercher des excuses, même
	sincères ! ni d'avoir des regrets, ou de tenter les
	implorations, les appels au pardon... [mimant,
	les bras et la face tendus vers le Ciel] « Des
	Profondeurs je crie vers Toi, Seigneur ! » /
	Mais qui pourrait t'entendre, ridicule petite vermine humaine,
	rampant dans la fange d'où tu n'aurais jamais dû sortir, où est
	la vraie place de ta méprisable condition ? Qui
	pourrait percevoir le filet gluant qui te reste de voix, au fond du
	trou du cul merdeux où tu gis, ad æternam in æternam, pour une éternité... dont
	tu n'as pas idée ! [criant]
	Moi si ! j'en ai idée. Et même assez précise. Ça
	promet. / Qu'est-ce que tu
	croyais ? Que l'univers visible et invisible était à ta
	mesure ? À ta mesure, il y a le monde ! C'est ta gamelle,
	en quelque sorte. / Te plains
	pas : d'autres ont eu droit à bien pire... et s'en sont mieux
	sorti que toi ! [il rit] Ah, ah,
	ah... Moi, je me marre, mais pour vous : ce sera fini de
	rire... Oh,
	ce n'est pas la peine de me regarder comme ça... moi, je ne vous
	ferai rien ! Et mes congénères non plus. /
	Ça vous étonne ? Mais ces histoires de visions infernales où
	les humains endurent toutes sortes de tourments, ne sont que des
	lubies d'artistes ! quel que soit leur talent. Dans la réalité
	(si l'on peut dire), c'est toi seul qui te feras souffrir ; et
	sans rien faire ; rien faire d'autre que de revivre les
	mesquineries de ta petite vie minable, avec toutes tes vilenies, tes
	bassesses et ta formidable médiocrité. Médiocrité orgueilleuse !
	qui plus est. Et que dire de tes grosses saloperies... Parce qu'il y
	en a ! pour chacun, et pour tous autant que vous êtes, qui
	n'avez pas vraiment idée non plus de qui est présent ici, autour
	de vous, à côté de vous... pas plus qu'eux ne savent ce que nous,
	toi et moi, savons sur toi et que tu ne voudrais pas qu'ils
	sachent. Et l'on est particulièrement gâté ce soir ! Vous
	pouvez me croire... Or
	ce n'est pas là le pire... Le pire, c'est l'omission ; tout
	ce que vous n'avez pas fait ! et que bien sûr vous
	auriez pu. Ça, c'est impardonnable... Et c'est pourquoi vous allez
	vous retrouver, plus vite que vous ne le croyez, là où vous vous
	êtes foutu tout seul. [geignant, grotesque]
	« Je savais pas... J'le
	jure ! » Pfff, aucune dignité. Remarque :
	ça ne changerait rien à votre sort, lequel est de souffrir, à feu
	vif ! Souffrir dans le souffre mordant, étouffer dans la fumée
	noire, brûler d'un brasier intérieur atroce ! indéfiniment...
	jusqu'à ce que... enfin : tout soit consumé ! et
	qu'il ne reste rien, pas même un souvenir, si tendre fut-il, y
	compris d'une bonne action. Les
	larmes de vos mères ne suffiront pas à réduire les flammes
	purificatrices du mal que vous aurez vous-mêmes allumé et
	constamment alimenté. Elles feront juste un petit pchiiit…
	en tombant sur les braises irradiantes, ce qui ne fera qu'augmenter
	votre supplice de les savoir en souffrir, comme seules les mères le
	peuvent. Qu'il n'y ait même pas de pitié pour elles... car elles
	ont enfanté le mal, le vrai ! pas celui que vous croyez
	que je représente. Moi, je ne fais que présenter votre nature
	profonde, intime. Tous les diables et démons, quel que soit leur
	degré hiérarchique, ne font rien d'autre que révéler l'ignominie
	qui vous habite, la secouant juste un peu, pour la réveiller et que
	vous vous réalisiez en elle. À
	qui la faute ? Vaste question... Et ce n'est pas à moi d'y
	répondre. |